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Riou - flore et faune

Le fantasme des îles... Riou,  la flore et la faune

 

Dans l'île les habitats se répartissent selon la concentration en sel du sol, soit un étagement parallèle à la côte.

- Au plus près de la mer, soumis fortement aux embruns, se regroupent les plantes halophiles (qui aiment le sel) dont plusieurs sont protégées comme la Saladelle de Provence. Cet ensemble est l’habitat privilégié d’un coléoptère rare, le Charançon de la Camphorée.

- En arrière des rochers littoraux, la garrigue à herbes grises est également soumise aux embruns mais de manière moins constante. Elle est constituée de végétaux halorésistants (qui résistent au sel). Plusieurs sont protégées : la Germandrée purpurine, le Lys des sables, etc. L’Aristoloche y est présente, elle constitue l'unique alimentation de la chenille d’un papillon rare et protégé : la Proserpine.

- Sur la roche plus compacte, les phryganes à Astragale sont également constituées d’espèces halorésistantes dont quatre sont caractéristiques et protégées : l’Astragale de Marseille, le Plantain à feuilles en alène, la Passerine hirsute et tarton raire.

- Au delà, les pelouses à Brachypode rameux, souvent en mosaïque, sont constitutives des garrigues littorales. Bien que pauvres en espèces végétales, en raison des conditions climatiques extrêmes, la conservation de cet habitat est classée prioritaire au niveau européen.

- A l’abri du mistral, buissons de lentisque et de romarin, parfois âgés de plusieurs décennies, forment une végétation en « peau de léopard» où se mêlent Fragon petit houx, Alaterne, etc. Elle offre un abri pour les passereaux migrateurs.

- Enfin les falaises tournées vers le nord, mais cependant soumises aux embruns, captent l’humidité atmosphérique et concentrent les rares eaux de pluie, rendues saumâtres par lessivage des sols. La Scolopendre, fougère qui bénéficie d’une protection nationale, pousse dans les fissures et les grottes .

 Les adaptations remarquables de la flore face au vent, au sel, à la sécheresse font la valeur patrimoniale des îles. Ainsi :

- Le Perce pierre ou Crithme maritime est une espèce halophile présente sur les rochers les plus proches de la mer ou les plus soumis aux embruns. Ayant tout de même besoin d’un peu d’eau douce pour survivre, il est doté d'un système racinaire particulièrement développé, pouvant atteindre plusieurs mètres, qui lui permet d’aller chercher l’eau douce en profondeur dans la roche. Cette espèce présente également des feuilles cireuses et succulentes, qui résistent à l’effet corrosif du sel et réduisent la transpiration. Ces feuilles ont des cellules qui stocke l’eau, lui permettant de survivre à la sécheresse.

- Beaucoup d’espèces ont une apparence grise telles que la Cinéraire maritime, l'Immortelle, ou encore la Germandrée purpurine.
Cette couleur est due à la présence de poils ou de duvet sur les feuilles et la tige. Ils forment une protection contre le sel mais aussi une couche isolant de la chaleur, réduisant l'évapotranspiration. Ces poils permettent également de capter la nuit l’humidité ambiante
indispensable pour survivre à la chaleur de la journée.

- La sélection naturelle a privilégié, pour la Petite Saladelle de Provence, le port en coussinet. Il offre une meilleure résistance à la sécheresse et au vent. Ce « bonzaï » se développe très lentement, réduit ses parties aériennes à de toutes petites feuilles, au profit de la croissance de ses racines, afin d’aller puiser l’eau au fond des fissures.

- L’Astragale de Marseille développe également, comme la Petite Saladelle, un port en coussinet et des racines, très développées. Mais ses feuilles, constituées de toutes petites folioles, étroites et poilues pour limiter l’évapotranspiration, vont plus loin dans leur adaptation : elles limitent leur surface foliaire au plus chaud de la saison en disparaissant, la tige centrale se durcit et devient une aiguille. D'où son nom de «coussin de belle mère ». Son port en coussinet associé à cet aspect piquant présente en outre l'avantage de protéger les graines des prédateurs : elles peuvent murir avant d’être disséminées.

- Le Lys des sables, lui aussi, a une adaptation particulière : il possède deux types de reproduction : une reproduction asexuée souterraine, au frais, grâce à son bulbe et une reproduction sexuée grâce à la production de graines noires qui vont se disséminer sous l’effet du vent et de l’eau. Ces deux types de reproduction demandent énormément d’énergie et c’est la raison pour laquelle, lorsque les lis fleurissent, toutes leur feuilles sont desséchées et de couleur paille : toute l’eau nécessaire est prise par la reproduction.

- Les plantes aromatiques, enfin, telles que le Thym ou le Romarin, ont également élaboré une adaptation au climat chaud. La nuit, elles produisent des huiles essentielles qu'elles vont libérer pendant la journée. Cette évaporation d'huile consomme de la chaleur, créant une ambiance plus fraîche autour de la plante, et crée une brume réduisant l'ensoleillement.

Ces adaptations ont mis des milliers d'années pour prendre la forme que nous observons aujourd'hui.
Par sélection naturelle seules ont subsisté les plantes dont l'évolution épousait les évolutions du milieu; des évolutions qui étaient relativement lentes.

Car face à une évolution rapide, comme le montre, à certaines époques, la brusque disparition de plusieurs familles de fossiles, le vivant dans son immense majorité ne subsiste pas. Il disparait. La Terre a ainsi connu plusieurs extinctions massives du vivant.

Apprécions donc et protégeons à leur juste mesure les plantes de nos îles....

Les animaux

Souvent considérées comme des rochers peuplés de seuls oiseaux, les îles de Riou sont en réalité les derniers refuges pour un grand nombre d’espèces animales en quête de tranquillité, une faune remarquable, discrète, fragile, menacée.

Les insectes

Les îles, du fait de leur isolement, des conditions climatiques particulières et de la singularité de leur flore, abritent plus de 275 espèces dont 20 d’intérêt patrimonial majeur. Il s’agit d’espèces rarissimes, endémiques des côtes provençales, ou encore, pour certaines, aujourd’hui disparues du continent.

Les reptiles

Deux espèces de reptiles vivent sur les îles de Riou, elles sont toutes protégées au niveau national.

1) Le Lézard des murailles, très commun en France, présente un intérêt patrimonial de tout premier ordre.
En effet, les populations de chaque île, sont isolées les unes des autre, et de celles du continent, depuis près de 6 000 ans. Cette espèce a donc évolué différemment d’un site à l’autre : ainsi les individus présentent des différenciations morphogénétiques.

2) Protégé à l’échelle mondiale, le Phyllodactyle d’Europe  est un tout petit gecko nocturne rarissime, endémique des îles de la mer
Tyrrhénienne. Les îles de Marseille abritent une très belle population qui se trouve en limite d’aire de répartition. La pollution lumineuse, les goélands ainsi que la prédation par les Rats noirs constituent les principales menaces qui pèsent sur cette espèce.

Les oiseaux

L’un des intérêts majeurs des archipels marseillais tient dans le fait qu’ils constituent un site d’importance primordiale pour la reproduction des oiseaux marins méditerranéens. Ils sont ainsi le seul site français abritant les trois espèces d’albatros présents en Méditerranée.

Les îles de Marseille accueillent également d’autres espèces, souvent rares et prestigieuses, qui utilisent les hautes falaises calcaires ou les buissons de lentisque et de romarin pour installer leur nid.

Ainsi, 16 espèces se reproduisent sur les archipels. Ce sont :

- des espèces marines : Puffin cendré, Puffin yelkouan, Océanite tempête de Méditerranée, Cormoran huppé méditerranéen et Goéland leucophée;

- des espèces rupestres : Faucon pèlerin, Faucon crécerelle, Chouette chevêche, Grand-duc d’Europe, Monticole bleu, Martinet pâle, Martinet à ventre blanc et Choucas des tours;

- des espèces des garrigues : Rouge-queue noir, Fauvette mélanocéphale, Moineau domestique;

- des espèces de passage : situées sur un important couloir de migration, les îles de Marseille constituent également des sites de repos pour un grand nombre d’oiseaux au cours de leur voyage. Ainsi, plus de 200 espèces d’oiseaux ont été observées sur les îles où elles
viennent hiverner, se reposer ou ne faire que passer…

Ces espèces ont besoin de tranquillité pour assurer les impératifs de la reproduction. La fréquentation des sites et l’augmentation exponentielle des goélands sont à l’origine de multiples perturbations mettant en péril le maintien des populations d’oiseaux remarquables sur ces archipels.

Les mammifères

Les rares mammifères présents sur les îles sont pour la plus part des espèces introduites volontairement tel que le Lapin de garenne et le chat, ou accidentellement comme le Rat noir et la Souris domestique.

Les seuls mammifères indigènes des îles sont la Musaraigne des jardins et le Molosse de Cestoni, la plus grande chauve-souris d’Europe. Les rats noirs (Rattus rattus) auraient été introduits sur les îles dès l’Antiquité.
Aujourd’hui, l’accroissement démographique très important des goélands est directement responsable de leur prolifération, source de perturbations particulièrement importantes sur la flore et la faune
insulaire.

​Le Rat noir est le principal consommateur de la flore et la faune insulaires .

Essentiellement végétarien, il consomme une cinquantaine d’espèces végétales dont certaines sont protégées telles que la Passerine tartonraire, le Plantain à feuilles en alène ou le Lys des sables. 
La végétation nitrophile, induite par la surabondance des goélands, est néanmoins la principale source de nourriture pour les rats. Or, celle-ci n’est pas adaptée aux conditions de sécheresse extrême caractéristiques des îles de Riou et se dessèche très tôt dans la saison (fin juin-début juillet). Principalement phytophage, le rat
est assez opportuniste et peut, en cas de pénurie, devenir carnivore. Il est alors capable d’exercer une forte pression de prédation sur les populations d’oiseaux marins que sont les Puffins et Océanites tempêtes.
Cette prédation s’exerce aussi bien sur les œufs, les poussins, et les adultes (uniquement sur l’Océanite tempête) pouvant mettre en péril la survie des populations d’oiseaux marins. Ils sont aussi des prédateurs potentiels du Phyllodactyle d’Europe.

Aussi des opérations de régulation sont réalisées. Selon la taille des îles deux méthodes sont employées :

• sur les petites îles, les rats sont totalement éradiqués,

• sur les plus grandes îles, des opérations de limitation des densités de rats sont menées toutes les années durant les périodes de reproduction des puffins.

Le Lapin de garenne a été volontairement introduit sur les îles de Marseille. Tout d’abord au XVIIIème siècle sur Riou, par les gardiens de la vigie, puis dans les années 1980 sur les autres îles. Il est aujourd’hui présent en grand nombre sur les îles de Riou et du Frioul, bénéficiant de l’augmentation de la biomasse végétale engendrée par l’explosion démographique des Goélands leucophées. En l'absence de compétiteurs et de prédateurs efficaces, les populations de Lapins de garenne se sont largement développées avec, pour conséquence, de multiples impacts sur la conservation de la flore mais aussi de la faune insulaire. Par consommation de certaines graines et plantules, le Lapin de garenne engendre une raréfaction d’espèces végétales protégées. Enfin, sur les secteurs sablonneux, les lapins en creusant leur galerie, déterrent les bulbes de Lys des sables.

Le Lapin de garenne est également à l’origine de perturbations sur les colonies d’oiseaux marins. Une concurrence s'instaure entre ce mammifère et les puffins pour l’occupation des terriers.
En creusant des galeries, le lapin provoque l’effondrement de certains
terriers de puffins. L’écrasement des œufs, des poussins ou tout simplement la perte du nid qui en découle peuvent alors conduire à l’échec de la reproduction.

Ces troubles influent sur la reproduction future de ces oiseaux : la perte du nid est une des causes principales de « divorce » chez les procellariiformes, oiseaux chez lesquels la formation du couple dure plusieurs années. Un « divorce » signifie donc la recherche d’un nouveau partenaire au détriment de la reproduction.

Des terriers artificiels ont donc été installés sur certaines colonies d’oiseaux afin de proposer des nids de substitution lorsque les terriers sont détruits.

Depuis 2006, des opérations de régulation des densités de Lapin de garenne sont menées dans les secteurs les plus fragiles de l’île de Riou afin de protéger la flore et les oiseaux marins. Lors de ces opérations, les lapins sont capturés à l’aide de pièges spéciaux puis confiés à la Fédération Départementale des Chasseurs qui, en partenariat avec l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS), attribue les animaux aux sociétés de chasse des environs afin qu’ils soient utilisés comme gibier de repeuplement et relâchés dans des secteurs non chassés.

Appel aux volontaires 

Sur les îles, des espèces végétales envahissantes (Figuiers de Barbarie, Luzerne arborescente, Agave…) se développent au détriment de la flore originelle et contribuent à la diminution de la biodiversité floristique. Il faut donc prévenir de nouvelles introductions et contrôler ou limiter les espèces déjà établies sur les espaces sensibles. Des opérations d’arrachage de ces espèces envahissantes,
nécessitant l’aide de bénévoles, sont donc organisées régulièrement sur les différentes îles.

​Sur certains secteurs des îles des exclos sont également construits de manière à protéger certaines espèces végétales (Coronille de Valence et Plantain à feuille en alène) du broutage par les lapins et les rats. Un suivi permet d'apprécier l’évolution des écosystèmes.

​Pour ces opérations, il est fait appel à des volontaires, une occasion de plus pour pour mettre pied en archipel...

Alors...bonne traversée, bonnes découvertes et ... attention où vous mettez les pieds, œufs fragiles !!